Bagatelle : «Y’a rien à dire », Abdelillah
Abdelillah habite dans le quartier de Bagatelle à Toulouse depuis 30 ans. Il nous livre son attachement au quartier, son histoire de migration qui retrace celle de beaucoup d’Algériens de Mostaganem. Le quartier, il l’a vu se transformer. Une rénovation urbaine avec ses destructions d’immeubles qu’il a vécue difficilement et dont il ne souhaite pas parler.
Il nous partage à demi-mot les regrets d’une jeunesse en errance avant d’intégrer la Régie de Quartier Desbals Services. Il est fier de ses deux aînés, l’une est médecin et l’autre travaille à l’OPAC. Pas d’inquiétude pour eux, mais beaucoup pour les jeunes de Bagatelle touchés par le chômage.
Paroles de la réalisatrice Sonore – Agnès Gontier
« Je sens qu’Abdelillah veut montrer le meilleur de son quartier. Il reproche aux médias de le stigmatiser, de montrer que le mauvais. En prenant le contre-pied, il me fait une visite guidée édulcorolorée de Bagatelle. Puis petit à petit, il finit par me livrer les difficultés dont le quartier doit aussi surmonter notamment autour de l’emploi des jeunes. »
Paroles de Marie-Christine Jaillet – Directrice de recherche au CNRS, Laboratoire Interdisciplinaire Solidarités, Sociétés, Territoires (LISST), Université de Toulouse
Abdelillah raconte une autre facette de l’histoire des quartiers populaires, qui ont accueilli à partir du milieu des années 1970 les immigrés et leurs familles, venus, pour beaucoup, des pays du Maghreb, puis venus également d’autres horizons. Le quartier de Bagatelle a souvent été décrit par ses habitants comme un village avec son centre commercial, sa place, son petit bois, ses associations, sportive et de quartier, où les habitants (pieds noirs, algériens ou marocains) partageaient une même nostalgie pour l’autre rive de la Méditerranée. Mais l’histoire de Bagatelle, c’est aussi celle d’une politique publique de rénovation urbaine qui a voulu ouvrir le quartier sur une autre centralité, celle de la rue Henri Desbals, et qui a remplacé les « vieux immeubles » par d’autres, au risque de bouleverser les repères de ceux qui vivaient là, pour qui cette transformation assez radicale de leur environnement a souvent été douloureuse. Il n’en est pas de même pour les habitants venus s’installer plus récemment qui ne portent pas en héritage cette histoire.
Ce que raconte aussi Abdelillah, c’est l’espoir placé dans le « modèle républicain » que chacun peut s’en sortir, améliorer sa situation et, bien davantage encore, que, par l’école, celle de ses enfants s’améliorera vraiment. Si « l’ascenseur social » n’est pas tout à fait à l’arrêt, néanmoins, il est de plus en plus à la peine pour les générations actuelles, confrontées au chômage et aux discriminations.
« Les habitant-e-s se la racontent ! » : un projet porté par la Régie de Quartier Desbals Services et l’association Résonance Sonore Lauréates de l’appel à projet : « Mémoires des quartiers, histoires en mouvement » lancé par Toulouse Métropole – Exposition visuelle et sonore à la Bibliothèque Saint-Exupéry à Bagatelle du 4 avril au 9 mai 2023.
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